Le 22e congrès de la FFAM, organisé par l'Association des Amis des moulins de l'Ain, s'est tenu les 12, 13 et 14 mai à Montrevel-en-Bresse (01).
Compte-rendu
de Françoise Bouillon. Extrait
d’un article de 6 pages avec photos
La Plaine Tonique, vaste complexe
touristique au bord d’un lac de 90 hectares (centre aquatique et base de
loisirs), nous accueille le vendredi 12 mai dans un ensemble de bungalows très
confortables. Les congressistes rejoignent ensuite la Salle des fêtes d’Etrez
à 5 km, où les actions de l’Association des Moulins de l’Ain sont présentées
par Michel Darniot, son président. L’Association de la roue du Moulin Gaud
est présentée par Jean-Paul Comas et l’Association Divonne Electro par
Michel Renaud, suit une présentation des moulins et rivières de l’Ain.
Ensuite le thème « comment réaliser une pico centrale » a été développé par Albert Higounenc, Michel Diébold et notre avocat Jean-François Remy. Ce dernier nous a exposé toutes les embuches que pouvait inventer, illustré par un cas emblématique d’un moulin du Lot qu’il défend au tribunal depuis plusieurs années, cet exemple édifiant a captivé et inquiété les congressistes, non sans raisons.
Plusieurs
élus, M Xavier Breton député de l’Ain, M Gérard Bailly Sénateur du Jura
et Patrick Chaize Sénateur de l’Ain, nous les remercions pour leur présence
à notre Congrès national et l’action qu’ils mènent dans la sauvegarde des
moulins.
Albert
Higounenc présente le livre Bleu Blanc Rouge des moulins, Bleu pour les faits rapportés par les associations sur le terrain, Blanc
pour les propositions que nous faisons, Rouge pour les incohérences et
inexactitudes du Plan d’Aménagement de la Restauration de la Continuité
Ecologique.
Ce
livre rédigé par Patrice Cadet scientifique et administrateur de la FFAM nous
expose un état des lieux de nos rivières et de leur biodiversité, les actions
à mener pour essayer de sauver ce qui peut l’être, à l’inverse des
actions aberrantes de l’administration qui vont tout droit à l’échec,
malgré les avertissements des scientifiques du monde entier.
Les
ateliers se terminent par une intervention brillante des 2 Sénateurs présents.
Patrick
Chaize, Sénateur de l'Ain, Maire de Vonnas,
Membre de la commission Aménagement du Territoire et Développement Durable du Sénat, Président de l'AVICCA, nous
redonne espoir un disant : « Pour les 50 ans de la FFAM il faudra
rechanger le nom de la FFAM, il n’y aura plus de sauvegarde à faire car les
moulins seront sauvés ».
Alain Forsans
Le
samedi 13 mai est réservé à la traditionnelle sortie de visites de moulins.
Les moulins de la Reyssouze. Cette rivière prend sa source dans le village de Journans à 285 m d’altitude. Elle conflue avec la Saône sur les communes de Reyssouze et Pont de Vaux à l’altitude de 169 m après un parcours de 75 km. Ce sont près de 650 km de cours d’eau qui constituent le réseau hydrographique du bassin de la Reyssouze.
A
partir du XIVe siècle, 40 moulins ont été bâtis le long de la
Reyssouze entraînant une modification de son tracé naturel, de son régime
hydraulique et de la dynamique fluviale. Cette rivière peut être considérée
comme une succession de plans d’eau séparés par des vannages. L’abandon
progressif de l’activité des moulins conjugué aux crues et aux problèmes de
salubrité, ont amené la création du Syndicat Intercommunal d’Aménagement
et d’Entretien de la Reyssouze (SIAER) destiné à réaliser des curages
drastiques de la Reyssouze et de certains de ses affluents (années 1960 à
1980). Certains moulins utilisent
aujourd’hui leur droit d’eau pour la production d’hydroélectricité :
le moulin de Cézille, le moulin Bruno et le moulin de Veyriat. D’autres
propriétaires de moulins ont également la volonté de remettre les turbines en
état pour pouvoir profiter de la force motrice de la Reyssouze.
Le
Moulin de Cézille ou moulin Gaud, à Jayat (siège de l’AMA 01). Nous
sommes accueillis par Jean-Paul Comas qui présente l’association « La
Roue du Moulin Gaud », chargée de la gestion du Moulin de Cézille. La date de construction du moulin est inconnue, mais elle se situe
entre le XIIIe et le XVe siècles, comme pour la plupart
des moulins de la Reyssouze. Il est devenu la propriété de M. Gaud en 1887. Il
était équipé de 2 paires de meules pour le blé, une pour les gaudes et une
pour les céréales secondaires. Son activité commerciale poursuivie par ses
fils prit fin en 1977. En 1978, le
moulin Gaud devient propriété du SIVOM de Jayat-Malafretaz-Montrevel. En 2003,
une convention est signée entre le SIVOM et l’AMA, qui, en la personne de
Jean-Paul Comas, s’est vu confier la responsabilité de la mise en valeur du
moulin.
En 2012, une association a été créée
dans le but de gérer le moulin de Cézille, laissant à l’AMA 01 la charge de
l’association départementale. Depuis juin 2012, tous les projets concernant
ce moulin sont ainsi portés par l’Association La Roue du Moulin Gaud, ainsi
que l’ensemble des manifestations sur le site : pendant toute la saison
estivale, le moulin est ouvert au public en partenariat avec l’office de
tourisme, la Plaine Tonique, le SIVOM, la ferme historique du Sougey, le musée
de Cuet, le Syndicat de la Reyssouze… etc (d’après notes de J-P. Comas).
Le
Moulin de Bruno à Jayat-Foissiat tient son nom du révérend-père Bruno, fondateur
de l’ordre des Chartreux (Voiron, Isère) Les premières pierres ont été posées
vers 1350. Il dépendait de la Chartreuse de Montmerle. Après la Révolution,
il fut vendu comme bien national. Il était équipé de plusieurs roues à aubes
jusque vers 1850 où une turbine Fontaine de 12 chevaux les remplaça. Transformé
en usine électrique en 1908, il redevint moulin à farine en 1925. La famille
Darniot achète la propriété en 1969.
De 1970 à 1973, Michel et Irène
Darniot conservent dans le Moulin de Bruno la même configuration de travail en
utilisant la force hydraulique tout en commençant à utiliser industriellement
le courant EDF. Un broyeur électrique à marteaux de 20 chevaux est installé début
1970 ainsi qu’une presse à granulés entraînée à la fois hydrauliquement
et électriquement. La société DARNIOT « le Père Jean, Aliments du bétail
» continue son commerce au sein d’un groupe mais le site de production
d’alimentation du bétail du Moulin de Bruno a cessé ses activités en
juillet 2000.
Aujourd’hui, afin de profiter
pleinement de ce bâtiment historique, Michel et Irène prennent plaisir à le
restaurer, et celui-ci commence à prendre des airs de musée. En 2006 et 2007,
d’importants travaux de rénovation intérieure ont permis de mettre au jour
de splendides murs de briques et de pierres de taille datant de la construction
du moulin ainsi que des colombages bressans qui jusqu’à ce jour se
dissimulaient sous des crépis. Afin d’agrémenter ces restaurations, pour les
passionnés de moulins et d’histoire qui leur rendent visite, de nombreuses
photos et vieux écrits sont exposés et des panneaux de présentation
accompagnent les matériels de meunerie actuels et anciens sur 3 étages.
Le
Moulin de Veyriat à Lescheroux. Avant la Révolution, c’était la correrie de
la Chartreuse de Montmerle, qui fut une des plus belles et puissantes
chartreuses de l’époque fondée en 1170 par le seigneur de Saint-Julien sur
Reyssouze. Après avoir été modernisé en 1848, le moulin est détruit par un
incendie en 1907 puis laissé à l’abandon pendant 15 ans.
Il appartient à la famille Comas
depuis son achat en 1922 par Léon Comas, grand-père du propriétaire actuel.
Il en a transformé une partie en scierie, installant une turbine de 8 chevaux.
Reconstruit en 1935, le moulin a recommencé à moudre du blé jusqu’en 1970,
date à laquelle l’activité artisanale a cessé définitivement. En 1980, il
appartient à Jean-Paul Comas qui a consacré beaucoup de temps à le restaurer
et à créer une microcentrale, puis un petit musée privé. Depuis plus de 30
ans, la restauration du moulin se poursuit. Beaucoup de documents d’archives y
sont collectionnés ainsi qu’un grand nombre d’ouvrages sur l’archéologie
industrielle du XIXe siècle.
Moulin
Marion à Saint-Jean sur Veyle. Autrefois Moulin Gaillard à la fin du
XIXe siècle, il était l’un des plus importants sur la Veyle,
comportant une paire de meules mue par des turbines. Aujourd’hui, Michel
Pelletier, son épouse Maria* et leur fils, gèrent avec dynamisme cette
entreprise familiale consacrée à la production de farines et d’aliments
« bio ». Ce moulin, dont les origines remontent au XVIe
siècle, a été la propriété des familles Verne, Marion et Pelletier au cours
des 2 derniers siècles.
L’ancien bâtiment au bord de la
Veyle a conservé au deuxième niveau 2 paires de meules et 3 appareil à
cylindres ; au troisième, le collecteur de farine et 3 plansichters. Après
avoir été modernisé dans les années 1980, il était devenu trop exigu et
surtout « hors normes » à cause de ses structures de bois. A
l’extérieur, les emplacements de plusieurs roues sont encore visibles ;
les turbines en chambres d’eau sont encore en place, l’une d’elles, de
type Fontaine-Baron, ayant été installée en 1875.
Georges Pelletier, membre fondateur de
l’AMA 01, a dirigé le moulin de 1962 à 1983. Après avoir racheté l’établissement
en 1984, Maria et Michel Pelletier se sont rapidement orientés vers la mouture
de céréales issues de l’agriculture biologique. En l’an 2000, une nouvelle
usine pour l’alimentation animale bio a été édifiée, complétée en 2009
par une minoterie produisant de la farine panifiable.
La filière « bio » propose
une farine que l’on peut qualifier de « naturelle » sans aucun
adjuvant, mais elle impose un processus de contrôle très strict. Un petit
laboratoire installé dans les locaux permet de vérifier rapidement les qualités
et le chargement. Les analyses de contaminants sont externalisées. Les blés de
diverses origines sont achetés dès la récolte : 3 000 tonnes sont
ainsi emmagasinées et d’autres stockées à la ferme. Les blés sont achetés
en culture dans diverses régions de France et le Nord de l’Italie. En
« bio », aucun traitement n’affectant le grain, c’est une
ventilation permanente à l’air froid qui facilite la conservation. Les céréales
sont stockées dans des silos à 7° avant d’entrer dans le processus de
mouture. Après une période de repos, le dosage et l’assemblage des variétés
sont effectués. Le transport des produits se fait par soufflerie, dans des
tuyaux en inox. Sur le site même du moulin Marion, un point de vente destiné
aux particuliers offre tout un éventail de produits biologiques et écologiques.
Le
MOULIN CROZET, sur la Calonne, petite rivière de 1'ouest de la Dombes, affluent
de la Saône, est situé à l‘écart du village de Montceaux. Le site comprend
3 bâtiments en pierre et pisé typiques du Val de Saône : le moulin,
1'habitation et la ferme (grange et étables). On trouve l’existence d’un
moulin à Montceaux dans un acte du milieu du Xe siècle. Les dates
gravées sur les bâtiments permettent de remonter au XVIe siècle.
Au XIXe, le moulin, appelé aussi « moulin des Crozes »,
était la propriété de la famille Chapuis. Pourvu de 2 paires de meules, il chômait
plusieurs mois par an lors des sécheresses, comme les 6 autres moulins alimentés
par la rivière.
De cette époque, il reste le beau
train d'engrenages en fonte, le rouet placé dans une fosse circulaire et sa
grande couronne à dents de bois, le tout complété plus tard par un couple
conique entraînant un arbre auxiliaire. La roue à augets de 3,50 m de diamètre
a été remplacée en 1936 par une roue métallique, encore en activité.
Arrêté en 1969, il n’avait conservé
que sa roue avec sa transmission et une paire de meules. Le moulin Crozet est
depuis 1996 la propriété de M. et Mme Martin, qui 1’ont restauré de manière
exemplaire. En une dizaine d'années, sans compter la rénovation de
l'habitation, M. Martin a reconstruit le moulin à farine qui comporte 2 étages :
au premier, un trieur à grains et une bluterie ; au second, un tarare et
un plansichter, le tout complété par une mélangeuse à farine et relié par
un système d'élévateur et de vis sans fin. Ces machines, toutes en état de
marche, proviennent de moulins dont le matériel voué à la destruction a été
sauvegardé par l'AMA 01.