Sauvegarde du Patrimoine. (43) La vallée des forges, Pont-Salomon, capitale de la faulx jusqu’au XXe siècle Par Bernard Sauldubois, article de 6 pages avec photos

 

Pont-Salomon est une petite commune située à quelques kilomètres au sud de Firminy, dans une profonde vallée parcourue par la Semène affluent de la Loire, rivière de 45 km qui prend sa source à Saint-Genest-Malifaux (Loire) à 1 200 m d’altitude et dont le débit moyen est de 1,90 m3/s.

L’énergie de la rivière fut utilisée sans doute depuis le Moyen Âge par les meuniers et les papetiers. En amont, les toponymes indiquent la présence de scies. On y trouve de nombreux moulins à farine, dont le Moulin Cheval qui remonterait à 1363. Au début du XIXe, on  note pas moins de 95 établissements hydrauliques : moulins à grains, scieries, deux moulinages et 3 papeteries, dont la papeterie du Crouzet toujours en activité. La Semène devient, au milieu du XIXe siècle, le moteur d'un actif foyer de production industrielle. Ateliers et forges s’établissent sur sept sites distincts tout au long de son cours sinueux. C'est l’origine du village-usine de Pont-Salomon, dédié à la fabrication de faulx et faucilles.

Alexis Massenet, père du compositeur Jules Massenet (1788-1863), s'installe à Saint-Etienne en 1839 pour ouvrir une entreprise de fabrication de faulx et faucilles à La Terrasse, commune de Montaud. Associé à Jean-Baptiste David, passementier et aux frères Jackson. Puis il achète des bâtiments à Pont-Salomon pour ouvrir, en 1842, une nouvelle usine plus économique grâce à l'énergie de l’eau de la Semène et concurrencer, à armes égales, l'usine de faulx de Rochetaillée, enclave de la commune de Saint-Étienne, appartenant à Pierre-Frédéric Dorian. En 1842 et 43, il achète trois papeteries aux lieux-dits Le Pont, Chabanne, Foultier-le-Haut, et un moulin au Vieux Moulin. Les quatre ateliers, équipés de vingt marteaux (2 étireurs et 18 platineurs) emploient une centaine de forgerons, dont 16 Allemands et Autrichiens aux postes les plus techniques. Ils produisent entre 250 000 et 300 000 faulx et 100 000 faucilles. Alexis Massenet et sa famille habitent un an à Pont-Salomon puis part pour Paris en 1848. Il finit de céder ses dernières parts à ses associés en 1854.

Pont-Salomon fonctionne sur le mode capitaliste de l’époque, l’inspiration fouriériste est évidente. L’usine de l’Alliance, symbole de la période Dorian, regroupe en un même lieu les ateliers et le logement ouvriers. Ouvriers et directeur se côtoient intimement. L’entreprise se développe suivant la même dynamique, liant étroitement ateliers, logements, école, mairie, église et lieux de détente

Depuis l’époque de l’installation en 1842 jusqu'à l'arrêt définitif de la fabrication des faulx en 1998, les techniques de production n'ont jamais été modernisées en profondeur, ce qui explique aujourd'hui la pérennité d'ateliers, de machines, d'outils et de bâtiments particulièrement représentatifs du XIXe siècle industriel.

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