Le Conservatoire
des meules et pavés du bassin d’Epernon.
résumé d’un article de 3 pages,
avec photos, par Jean-Paul Duc.
Annoncé
lors du colloque de La Ferté-sous-Jouarre, le projet a été mené à bien en
un temps record ( moins de 3 ans , recherche du lieu et les modes de financement
compris ) grâce aux efforts conjugués de la Région Centre, du Conseil
général d’Eure-et-Loir, du SIPAC, syndicat du Pays Chartrain et
surtout de la municipalité d’Epernon. Cette dernière a vu dans cette réalisation
une occasion unique de valoriser son patrimoine industriel au moment même où
elle accentue ses efforts vers la création de nouvelles zones d’activités et
d’emploi.
Le nom d’Epernon est bien connu dans tous les moulins, de France ou
d’ailleurs, et pourtant aucune meule n’en a jamais porté le nom.. Toutes
ont été marquées « de La Ferté-Sous- Jouarre ». Il faut dire que
le site d’Epernon n’a réellement existé au plan industriel que sous l’égide
de sa grande aînée et que, jusqu’au 19ème siècle, la production de
meules d’Epernon est restée purement locale. La première trace écrite trouvée
est de 1756 pour les moulins locaux d’Emancé et de Droue. Un recensement,
effectué par la Préfecture peu après la Révolution, indique que même les
moulins locaux ne tournent qu’avec des meules
de Houlbecque ou des Molières. Il faudra attendre 1845 pour assister réellement
à l’essor local de cette industrie. En effet, c’est à cette date que
survient l’événement qui va bouleverser toute l’économie régionale :
l’arrivée du chemin de fer. Réclamé à grands cris par la municipalité
d’Epernon (qui mettra même largement la main à la poche pour faire modifier
le tracé et avoir une gare), le train devait en principe faciliter
l’expansion de l’activité lainière de la ville, industrie liée aux
nombreux troupeaux de moutons qui paissaient en Beauce. Or, l’effet fut
exactement inverse de celui espéré, le train supprima les emplois dans le
textile. L’exploitation des carrières se développa alors, donnant du travail
à la main d’œuvre locale.
La
progression de l’extraction qui se fera, en une centaine d’années, sur une
distance d’environ 30 km Dès 1858, une fois ces premiers remous passés, une
étude concluait que le silex d’Epernon, étudié au microscope, était celui
qui se rapprochait le plus du silex de la Ferté-sous-Jouarre. Aussi
s’alliait-il parfaitement avec lui et c’est ainsi qu’une meule gîte d¹Epernon
et une meule courante de La Ferté faisaient pour certaines localités
d’excellentes paires. Dès 1885, 750 ouvriers furent occupés quotidiennement
dans les diverses carrières pour des salaires variant de 5 à 10 francs par
jour. Les diverses sociétés locales participeront aux expositions
universelles, comme Theill à Londres ou à Paris Besnard, dont Roger fils
s’appropriera la médaille car Besnard est son directeur et que lui-même
n’avait pu se présenter, les Fertois s’y étant opposés.
Au début du siècle dernier, alors que la conjoncture concernant l’emploi
n’était pas des meilleures, la préfecture interrogée par le Ministère du
Travail indiquait qu’outre la fonderie Theisset, Rose et Brault qui
travaillait également pour les moulins, seules dans le département les carrières
d¹Epernon étaient florissantes et que 1 200 salariés y travaillaient. La société
des frères Theill est vendue à Moulin père, celui-ci pour des raisons de
justice préférant aller explorer la région de Nogent le Rotrou (28)
Les sociétés fertoises commençaient à s’installer vraiment, à fusionner
avec les sociétés locales. Les chantiers Lallier-Vernot vont être repris par
la société Dupety-Orsel, rue de la Madeleine, la société Chevrier,
Moulin père avec Roger fils
et vont constituer la société meulière avec le père Chevrier comme
directeur. Moulin Père va vendre à cette nouvelle société sa partie
d’exploitation meulière, conservant pour son fils la partie grès.
A
cette époque, il ne restait plus sur place que la société « L'Abrasienne »
qui produisait des meules composites à base d’émeri, de silex locaux et de
ciment. Cette société s’était imposée, venant également des cieux fertois
en 1911, sur un site de Lallier-Vernot. L’émeri arrivait par trains entiers
en passant par des bateaux de l’île grecque de Naxos. Cependant cette dernière
entreprise a fermé à son tour ses portes en 1971 à Epernon pour se
replier sur la ville du Mans où elle est prospère avec des productions de
meules abrasives.
C’est par devoir de mémoire envers ces milliers d’hommes qui se sont échinés,
tels des galériens, jour après jour, par tous les temps, à sortir les blocs
de pierre de la terre glaiseuse et à les transporter jusqu’aux ateliers où
d’autres prenaient le relais pour les façonner, les mettre en forme, que le
conservatoire a été créé.
L’Association
« Epernon Patrimoine et Alentours » ayant été à l’origine du
projet, a reçu de la municipalité la charge de le gérer. Elle présente une
belle collection d’outils et de documents intéressants. Elle a elle-même
publié une brochure consacrée aux « Carriers et meuliers d’Epernon »,
volume vendu au prix de 15€, frais de port inclus.
Le « Conservatoire des Meules et Pavés du Bassin d'Epernon » est
ouvert du 1er mai au 31 septembre les mercredis, samedis, dimanches
et jours fériés, de 10 à 12h et de 14h à 18h. Les autres jours, sur
rendez-vous. Site du conservatoire : http//meulesetpaves.free.fr