Moulins du Finistère-Nord.

 Résumé d’un article de 6 pages, présenté par Benoît Huot, avec de nombreuses photos.

  Le Finistère compte environ 3800 sites de moulins dont 600 à vent. Beaucoup ont disparu, d'autres sont devenus des résidences, trop peu s’offrent à nous. Ces moulins à marée, à papier, à poudre, à foulon, à tan, à huile, à teiller, à blé noir, et à céréales ont été répertoriés, recensées, vous les côtoyaient chaque jour au bord d’un chemin sans les voir.

L’écomusée des monts d’Arrée

De part et d’autre de la ligne de crête de l’Arrée, qui matérialise la frontière naturelle entre deux évêchés du Finistère, la Cornouaille au Sud et le Léon au Nord, se rencontrent les deux sites qui ont été achetés par le département pour le compte du Parc Naturel Régional d’Armorique.

Dès 1968, la Maison Cornec à Saint-Rivoal, construction imposante datée de 1702, fut restaurée selon les techniques traditionnelles. Cette maison qui est restée exceptionnellement dans un état proche de celui d’origine, raconte la vie d’une famille de paysans défricheurs au début du XVIIIe siècle, qui ont laissé leur nom aux lieux, et les parcelles proches de la maison, étable, bergerie, grange, lavoirs forment un environnement quasi inchangé depuis trois siècles.

Au Nord de l’Arrée, le hameau des moulins de Kerouat en Commana retrouve vie 6 ans après le décès de son dernier occupant. En fonds de vallée, cet ensemble qui rassemble 19 bâtiments construits entre 1610 (moulin du haut) et 1920 (écurie) constitue un témoin fidèle du mode de vie au XIXe siècle. Pendant cinq générations, la famille Fagot va ici, construire, défricher, développer l’activité jusqu’à employer 8 domestiques vers 1860.

Le moulin du haut, équipé à l’origine d’une roue horizontale ou pirouette, fut vers le milieu du XIXe modernisé. La roue verticale, à godets peut entraîner trois meules simultanément en fonction de l’eau disponible, qui vient parfois à manquer en août et septembre.

L’ensemble de engrenages, les paliers et la roue viennent d’être refaits à neuf par l’entreprise de Benoît Lauriou. Le moulin tourne à nouveau comme une horloge. Ce moulin, plutôt modeste (classé en moins de 25 quintaux/jour en 1809) cessera son activité en 1942. Reconstitué à l’identique, il sert régulièrement lors des démonstrations de mouture. C’est aussi pour le public scolaire un exemple concret du patrimoine technique rural.

Le chevelu dense des ruisseaux et rivières du Finistère a été intensément utilisé avec plus de 3 000 moulins recensés. Un superbe moulin seigneurial existe à Huelgoat au XIVe siècle.

Le moulin du Pont à Daoulas

Le moulin du Pont à Daoulas est une installation dont les sources historiques révèlent clairement l’existence dès  1272. L’ appareillages de pierre de la façade du moulin laissent penser que sa partie basse date du XVe siècle.

Au début du XVIIIe siècle, le bâtiment ne comprend toujours que la partie basse. Mais il possède alors trois systèmes de mouture alimentés par trois écluses. Au début du XXe siècle, le moulin a gagné un étage et son système de production a été revu.

En 1936, le moulin est qualifié de minoterie, ce qui dénote une mutation industrielle fondamentale de l’équipement. Celui-ci est toujours en grande partie présent dans les étages. Le moulin du Pont a travaillé jusqu’en 1968.

L’Association des Amis des moulins du Finistère, la Fédération Française des Amis des moulins et l’expert en meunerie et minoterie Benoît Lauriou, ont indiqué et affirmé le caractère assez exceptionnel de son installation de production. L’état de conservation de l’ensemble  permettrait une remise en marche à moindre frais (sans production toutefois) et la configuration des lieux offre la possibilité d’établir une circulation des visiteurs autour des machines. La commune de Daoulas a donc décidé de faire du moulin du Pont un écomusée de la meunerie et de la minoterie et d’en faire le futur siège de l’Association des Amis des moulins du Finistère

Moulins à blé noir de Lansolot .

Ce moulin est blotti au fond d’une vallée, sur la rivière « La Flèche » , commune de Saint-Derrien.

Ancien moulin banal, sa construction daterait de 1646. Il dépendais d’un manoir situé sur les hauteurs, le manoir de Kerbrat. Vendu comme bien national à la Révolution, plusieurs familles se succédèrent pour Le faire fonctionner soit en tant que propriétaire soit en tant que locataire. Il a toujours fabriqué de la farine de blé ou de sarrasin.

Au  XXième siècle il va être transformer entièrement avec l’extension du bâtiment principal, puis au début des années 40, l’installation des deux turbines, moteur et cylindres. En 1947, je deviens une petite minoterie. En 1968, il ne moud plus que du blé noir surtout celui de pays dont la farine permet la confection du plat typiquement léonard « le kig ha fars » et de galettes.

En 1903, Monsieur Cann, devient propriétaire.

Les moulins à blé de Lézerazien

Situé au point de rencontre des limites des communes de Landivisiau, Lampaul et Guiclan, c’est cette dernière qui l’a sur son cadastre. Le Quillivaron et le Roscolvazé, deux ruisseaux proches de leurs sources, se rejoignent et s’unissent pour lui donner  leurs forces,  droits d’eaux dont ils jouissent depuis 1494.

L’étang au dessus du moulin est une retenue artificielle construite à mains d’hommes sur deux biefs (1,5 km et 600m) amenant les eaux du Rozcolvazé et du Quillivaron. Cela crée une chute d’eau permettant d’alimenter en parallèle les trois roues à pirouette des trois moulins appartenant au Seigneur qui disposait des droits de « moutaux ».

Un quatrième moulin dit « Moulin Neuf d’en haut » situé dans la propriété du Séminaire n’a pas survécu au delà de 1810 environ. Il fonctionnait avec une seule pirouette. Sa construction n’était pas antérieur à 1791.

En 1913 Remplacement des 3 moulins par un seul à 3 paires de meules avec une grande roue à aubes et un système de transmission par pignons. En 1929 Construction de la Minoterie actuelle au lieu et place du moulin à meules .

Son  activités cesse en Octobre 1962, et il devient un simple entrepôt de stockage de farine

Le moulin à Tan de Lézerazien

Le tan  est obtenu par le broyage de l’écorce de chêne et est utilisé pour rendre la peau  des animaux imputrêssible, opération de tannage.

En 1798 Il existe un moulin à tan au Ponthou (Arch. Dépt. 1Q691). Un acte de 1896 mentionne qu’il a cessé son activité en 1884. Il est mentionné sur le cadastre de 1827

En 1811 19 moulins à tan existent dans le Finistère, surtout dans le Léon, dont celui de Lezarazien et de Traon Vilin son voisin moins important son mécanisme était deux fois plus petit.

En 1919 Le moulin à tan s’arrête. Depuis il a été amputé de sa roue à aube,  les croisillons en fonte s’étant brisés

Le mécanisme du moulin à tan (XIXéme siècle)

La roue hydraulique à aubes d’un diamètre d’au moins 3,5 mètres et d’une largeur de 120 cm, placée sous une chute d’eau équivalente à 4 mètres, entraîne une roue comprenant 104 dents en bois de cormier tournées. Ces doigts en bois très dur, s’engrènent dans les 44 dents de celle en fonte, placée entête de l’arbre à cames. Sa vitesse de rotation en est ainsi plus que doublée.

L’arbre à cames d’une longueur de 3,80 mètres, d’un poids approximatif de 600 kilos comporte trois paliers et huit cames. Elles font monter alternativement les pilons guidés par des glissières verticales et les laissent choir de tout leur poids dans une auge métallique à fond de bois. Elle a sans doute remplacée une en pierre taillée dans notre bon vieux granit.

Chaque pilon est terminé par un trident équipé de deux outils fendus tel un pied de biche placés de part et d’autre d’un burin central. L’un tranche, les deux autres font éclater l’écorce.

Le moulin est à l’arrêt. La barre positionnée à l’horizontale d’un côté de la cuve servait d’appui aux cames et maintenait les pilons relevés. L’ouvrier y travaillant depuis l’aurore jusqu’à la nuit pouvait ainsi vider la cuve sans risque, vérifier l’état des outils, les changer ou les affûter au besoin.

L’axe de l’arbre à cames prolongé jusqu’à l’extérieur du moulin faisait fonctionner la batteuse et toute autre machine agricole de l’époque.

La manufacture des tabacs de Morlaix

Auparavant située au manoir de Pen-an-Ru, la manufacture des Tabacs est fondée en 1736 à l’instigation de Louis XV. Ce bâtiment est construit de 1736 à 1740 sur le site du Palud Marant, vaste marais submergé à chaque grande marée. Jusqu’à  la Révolution, des tabacs à mâcher et à priser ainsi que des andouilles y sont fabriqués. En 1776, elle compte 750 ouvriers et est supprimée en 1791, comme toutes les manufactures. En 1811, le monopole d’Etat est rétabli après remise en état des bâtiments et du matériel. Agrandie à partir de 1830, elle est à nouveau modernisée entre 1863 et 1870.

Moulins de râpage

En janvier 1870, débutent, après une certaine résistance de la part des ouvriers, les travaux de mise en place de ces moulins, utilisés pour le râpage mécanique du tabac. Cette opération servant à fabriquer de la poudre est mise en mouvement par une machine à vapeur. Le tabac, presque carbonisé par une fermentation préalable dans des casiers en bois, est placé dans des cuvettes et est pulvérisé par cisaillement grâce à une noix en fonte munie de lames. L’ensemble de la modernisation de la manufacture, et de ses chaudières, motrices et moulins, est achevé à la fin de l’année 1872. Ces moulins ont fonctionné jusque dans les années 1970.

Le moulin à marée du Dourduff-en-Terre

Dans le Finistère, une vingtaine de moulins à marée sont recensés. Ce type de moulins qui utilisent la force de l’océan, est une spécificité des côtes. M. et Mme Havelka ont expliqué le fonctionnement de leur moulin, dont la roue était actionnée par l’eau de la rivière du Dourduff ou l’eau de la mer selon le coefficient de marée. L’histoire du lieu est aussi fort intéressante. Construit au XIVe siècle, il a reçu la visite de la duchesse Anne. Arrivée en bateau, elle aurait débarqué sur le quai, qui existe encore, et se serait reposée avant de se rendre pieds nus en pèlerinage à Saint-Jean-du-Doigt dont la fontaine était réputée pour guérir les maladies des yeux.

Le moulin de Brézal

Nous sommes sur la commune de Plounéventer, aux limites de Saint Servais et de La Roche Maurice. Brézal est une très ancienne terre seigneuriale, dont les bois dominent l'Elorn. Le site de Brézal, tel que nous le voyons aujourd'hui, est du à Guillaume de Brézal qui fit construire l'énorme digue retenant l'étang afin de faire fonctionner un moulin à papier dès 1520..

 Il faut savoir que le premier acte mentionnant une industrie papetière en Bretagne date de 1499. Le papier qui sort du moulin de Brézal est filigrané du fermail des Kersauzon.

En 1776, Maître Pierre Huet dirige les papetiers, le moulin produit 3 000 rames de papier. La roue actionne 5 piles à maillets. François Huet (certainement le fils de Pierre) prend la suite en 1787. Le 20 mars 1787 le propriétaire du domaine est M. de Tinténiac. Le moulin et ses dépendances sont exploités par François Huet. En 1789, M. Tinténiac émigre. Ses biens sont mis en vente par le Commissaire du Directoire. La mise à prix est de 3 488 francs. M. Sylvain Gabriel Saligny, originaire de Paris, acquiert le moulin et ses dépendances pour la somme de 14 300 francs le 6 floréal an IV.

Le domaine change souvent de propriétaire de 1795 à 1848 pour devenir la propriété de la famille Huon

En 1823, Brézal occupe 18 ouvriers et fabrique annuellement 2 860 rames de papier, il devient  un des moulins les plus importants de la région. En 1828, 55 tonnes de drilles permettaient de fabriquer 28,5 tonnes de papier. En 1836, Maître Michel Le Hideux âgé de 60 ans ayant pris la suite de la famille Huet décédait. Son épouse, aidée de son fils Auguste s'occupe de la production avec une dizaine de compagnons jusqu'en 1870. Au début de ce siècle, le moulin change certainement d'activité car on situe encore l'emplacement d'une roue à pirouette et d'un four à pain placé entre le moulin et la digue. Entre 1963 et 1967, il est sauvé de la ruine par le propriétaire de l'époque Charles Huon de Penanster Monsieur Vincent Huon de Penanster vend en 1982 à Monsieur Gourlaouen. La famille Gourlaouen est toujours propriétaire du domaine. et  aménage le restaurant actuel tenu par un ami des Moulins: Arsène Héliez.

Merci à tous les amis des moulins du Finistère qui nous ont communiqués ces notes, fruit de leur travail de recherche en archives et sur le terrain.


 

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