Moulins
à vent en Franche-Comté
Par Bernard Sauldubois. Photos de l’auteur. Extrait d’un
article de 7 pages avec carte
Il a toujours été de notoriété
publique que l'est de la France et notamment la Franche-Comté n'avait jamais
possédé de moulins à vent. « II
n'existe point de moulin à vent en Franche-Comté ! » déclarait le sénateur
du Doubs François-Marie d'Aboville en 1805. La richesse du réseau
hydrographique de ces régions et la relative régularité des rivières alimentées
par des précipitations importantes (1 200 à 1 500 mm) procuraient l'énergie
pour un nombre de moulins à eau suffisant pour la population. La meunerie
comtoise du Moyen Âge au XIXe siècle est essentiellement
hydraulique. On trouvait cependant des moulins à bras, des moulins à sang et,
sur le cours inférieur du Doubs, des moulins-bateaux. Des études récentes
conduites pendant plusieurs années par Jean-Luc Mordefroid ont révélé la présence
de moulins à vent en nombre non négligeable, 40 en Franche-Comté. On trouve
aussi quelques informations sur les moulins à vent comtois dans la brochure du
Docteur Jean-Marie Thiébaud. Dans son ouvrage "Les Moulins de Franche-Comté",
il en recense 5 dans le Jura, 5 dans le Doubs et 5 en Haute-Saône.
Alain Belmont, LARHRA Université de
Grenoble, de son côté a inventorié environ 80 moulins à vent dans les Alpes.
Il existait également des moulins à vent dans l'ouest de la Lorraine, comme
l'a montré Jean-Yves Henri, chercheur au service régional de l’Inventaire général
du patrimoine culturel de Lorraine.
Jean-Luc Mordefroid, le spécialiste
des moulins à vent de Franche-Comté, distingue trois périodes.
Première période : le Moyen Age. Cette
période s'étend jusqu'à la Renaissance. Le moulin de Champvans est le plus
ancien. Il existe dès 1302. Il était associé à un moulin hydraulique. Ce
sera un site de moulin jusqu'au XIXe siècle. C'est un des piliers de
l'histoire des moulins en Franche-Comté. Le deuxième site est celui de
Chargey-les-Ports en Haute-Saône, à peine plus récent, 1385 que l'on retrouve
en 1423, qui sera occupé par des moulins à vent jusqu'au XIXe siècle.
Dans les Alpes, on a découvert un moulin de la fin du XIIe siècle,
pratiquement contemporains des premiers moulins français.
Deuxième période : "l'âge
d'or" des moulins. A
partir du projet de Pont-sur-l'Ognon (1548), une bonne douzaine de créations
vont se succéder à partir des années 1570. On assiste alors à une
floraison de moulins à vent. La majeure partie de ces moulins s'est implantée
autour de Dole et sur les plateaux jurassiens, là où les cours d'eaux sont
rares ou d'un faible débit et où les vents sont relativement favorables. Une
bonne partie de ces moulins seront détruits au cours de la Guerre de 10 ans
(1634-1644), épisode franc-comtois de la Guerre de trente ans (1616-1648).
Troisième période : le XVIIIe
siècle et la Révolution
Au XVIIIe siècle, on
constate un ralentissement des implantations et la consolidation des mêmes
aires géographiques. Seuls le nord et le sud de la région n'accueillent pas de
moulins à vent.
Jusqu'à la Révolution française, le
moulin hydraulique a un statut juridique très particulier, clair à peu près
partout. Ce n'est pas le cas du moulin à vent. En droit d'ancien Régime, les
moulins à vent sont considérés, selon les régions, comme immeuble ou comme
bien meuble parce qu'ils sont majoritairement en bois. La Franche-Comté est une
région orientée Nord/Sud partagée entre 2 droits. Les études ont montré
que, dans l'ensemble de la région, les moulins ont le même statut juridique :
ce sont des meubles, qu'ils soient en pierre ou en bois. Cela signifie qu'ils échappent
à la banalité.