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- Histoire
du moulin-tour de Templemars (suite) , par Yves Coutant
Extrait d’un article de 6 pages avec photos.
Le moulin-tour de Templemars est déjà en activité lorsqu’il apparaît
dans les comptes en 1379. Il appartient pour la moitié au seigneur de Cysoing,
à qui on paie un demi-cens de 30 rasières lilloises de blé1. Le nom du
copropriétaire reste inconnu, même en 1388, où nous apprenons seulement
que c’est une femme et que la redevance a déjà augmenté puisque la
moitié due au seigneur de Cysoing revient à 3 muids 10 rasières, soit 46 rasières,
à remettre à la Saint- Rémi (1er octobre). Cette année-là, de grands
travaux sont entrepris, qui occasionnent 18 jours de non-activité au moulin.
Un nouveau chemin de roulement, une nouvelle queue et deux nouveaux volants
sont mis en place. Les six pièces de bois destinées aux volants sont achetées
au chapitre de Tournai, où elles sont taillées en entrebuts et pointes. Dix
hommes et douze chevaux conduisent ceux-ci ensuite jusqu’au moulin. À eux
seuls, les deux volants requièrent 205 livres de pièces métalliques, clous
inclus. Lors du transport de la queue, pour laquelle on avait acheté un orme au
seigneur d’Hallennes (Hallennes-lez-Haubourdin, à l’ouest de Lille, à
quelque 8 km de Templemars), le timon de la charrette se brise. Pour une raison
que nous ignorons, probablement par indigence, le meunier-censier, un certain
Jehan de Viane, de Lille, quitte le pays avant terme, après n’avoir payé que
11 rasières 1 havot. Au carême 1392 (n.s.2), le moulin tourne à deux volants
pendant six semaines, pour ce que on n’osoit riens faire
de le partie de Jehan de Werchin [Jean III de Werchin], menseigneur, pour
doubte d’atenter [c.-à-d. par crainte d’entreprendre un acte blâmable, en
travaillant sans l’ordre exprès du seigneur]. À quoi le receveur fait-il
allusion ? Jeanne de Walincourt, petite-fille de Jean de Walincourt, qui s’était
déclaré dès 1316 seigneur de Cysoing et ber de Flandre3, avait épousé
Jean Ier de Werchin, sénéchal de Hainaut. Après le décès de sa femme, ce
Jean Ier de Werchin intervint dans la gouvernance de la seigneurie de Cysoing au
nom de son fils ainé et héritier Jean, encore mineur. Quand celui-ci, devenu
entre-temps Jean II de Werchin, mourut vers 1377, ce fut son frère, Jacques
(Jacques III de Werchin), qui devint baron de Cysoing et qui gouverna la
seigneurie jusqu’à sa mort, en 1383 ou 1384. Sa veuve, Jeanne d’Enghien, se
remaria dès 1385 avec Jacques d’Harcourt, seigneur de Montgomery. Avec sa
femme celui-ci assuma la tutelle des trois enfants de Jacques IIIde Werchin,
encore en bas âge :
1 La rasière à froment lilloise, qui valait 4 havots ou 8 hotteaux ou 16
quargnons, correspondait à 70,18 litres. Douze rasières valaient un muid. Les
mesures tournaisiennes valaient 1,66 fois celles de Lille.
2 Dans le nouveau style (n.s.), l’année commence le 1er janvier, alors
que dans l’ancien style (a.s.), elle commençait à Pâques, du moins en
Flandre.
3 Mémoires de la Société d’Emulation de Cambrai, XXXI. Jean, Jeanne et
Philipote. Jusqu’au 1er novembre 1390, date à laquelle l’aîné, Jean,
atteignit l’âge légitime pour assumer le gouvernement de son domaine – il
entrera dans l’histoire en tant que Jean III de Werchin –, le cens se payait
à Jacquemart Jozet, homme de paille de Jacques de Harcourt. Le passage du
pouvoir ne se fit pas sans heurt, comme le prouve par exemple le
non-remplacement du volant manquant pour doubte d’atenter. Jean III de Werchin
dut même procéder contre sa mère, Jeanne d’Enghien, au sujet du douaire.
Tout porte à croire qu’il fallut attendre la mort de Jacques d’Harcourt
pour qu’un accord définitif intervienne le 4 janvier 1418 (n.s.) avec Jeanne
d’Enghien. Celle-ci abandonnait ses