Où en est la petite hydroélectricité ?

L'eau n'est pas un bien marchand comme les autres mais un patrimoine qu'il faut protéger, défendre et traiter comme tel, précise la Directive-cadre sur l’eau du 23 octobre 2000 de l’Union Européenne.

L’ADERA (Association de Développement des Energies Renouvelables et Alternatives), a organisé le samedi 5 novembre une journée de visite d’une centrale hydraulique à Scey-sur-Saône (330 kW). Intervention de Philippe de Montalembert de la Société Hydronext sur les solutions et contrats après 2012 (Hydronext a été fondée exclusivement pour répondre à la problématique de "l'après 2012" de la profession hydraulique. Elle présente l'ensemble des possibilités de vente de l'électricité pour les centrales arrivant en fin de contrat). Visite d’un site hydraulique en rénovation à Baudoncourt (30 kW) et de la rénovation d’un ancien moulin à Luxeuil (72 kW).

France Hydro Électricité, syndicat professionnel des petits producteurs d’hydroélectricité, représente aujourd’hui plus de 500 centrales réparties sur tout le territoire français, avec une puissance installée cumulée de 4 300 MW environ (soit 18% de la puissance installée hydroélectrique en France) ainsi que des entreprises, bureaux d’étude, turbiniers, fournisseurs de matériels électriques et mécaniques. France Hydro Électricité assiste les adhérents dans la gestion de leurs installations et le développement de leurs projets. Il les défend, les informe et les assiste sur les aspects juridiques, administratifs et techniques. L’hydroélectricité représente 12% de la production électrique française et 95% de la production d’électricité d’origine renouvelable. Un communiqué de presse a été envoyé le 19 octobre à 300 journalistes pour annoncer la parution du guide « Vers la centrale hydroélectrique du XXIe siècle », travail de concertation et volonté de faire savoir. Informations sur www.france-hydro-electricite.fr Contact : Anne Pénalba Présidente France Hydro Électricité, 66 rue la Boétie 75008 Paris. Tél. : 01.56.59.91.24 - Fax : 01.56.59.91.23. Courriel : francehydro@france-hydro-electricite.fr - Responsable communication : Véronique Lelièvre, Tél. : 01.56.59.91.24 ou 06.19.91.04.71 - veronique.lelievre@france-hydro-electricite.fr.

La décision de l’Allemagne de vouloir sortir du nucléaire a rappelé à tous une évidence : la transition énergétique est en marche. Quels risques pour la France si elle ne modifie pas son mix énergétique ? Les énergies renouvelables ? Quel rôle et quels outils pour nous transformer en territoires à énergie positive ? Voici l’exemple de deux sites pionniers.

Un exemple d’installation privée : la turbine « Hydrolec » du moulin de Neuville-sur-Sarthe (72). Près de 30 années d’exploitation résumées par Jean-Paul Sivadier, propriétaire du moulin :

Lors de la conception de cette machine, les ingénieurs de Leroy Somer devaient avoir un cahier des charges du même genre que Citroën, lors de la conception de son inusable 2CV. La turbine « Hydrolec » de Leroy Somer se voulait simplissime à la pose et à l’usage. Son rendement ne serait jamais exceptionnel puisque pour simplifier, et alléger la facture, on faisait l’économie du distributeur. (Pièce de chaudronnerie qui oriente le flux de l’eau à l’entrée de la turbine).

Pour permettre le fonctionnement en autonome, les ingénieurs avaient délibérément opté pour la production à charge constante, à l’aide de résistances. Autrement dit, système de production « tout ou rien ». Avantages, stabilité de la production, quel que soit le niveau de la consommation… Inconvénient, consommation d’eau et fatigue de la machine maximum, même en l’absence de consommation de l’électricité produite (cet inconvénient n’existant plus lorsque la turbine est reliée au réseau, pour la vente de la production).

Avant de franchir le pas j’avais interrogé une bonne vingtaine de propriétaires, qui n’avaient pu que confirmer la solidité de la mécanique. Construite en un seul bloc, immergé ou non, la machine comporte une hélice (à 2 ou 3 pales) entrainant un multiplicateur (à train planétaire) et une génératrice asynchrone. Le tout sous carter étanche rempli d’huile (60 litres pour mon cas). Le bloc est fixé dans un double cône entre lesquels l’eau circule. Leroy Somer aurait vendu environ 1 500 turbines de ce type, sous plusieurs versions aux puissances différentes. En 1982, j’ai installé cette turbine immergée au moulin de Neuville, Type H11, Hélice Kaplan 3 pales, diamètre 1m, vitesse 200 t/m, génératrice 1 000 t/m. Avec une chute de 2.25m, absorbant 3m3 seconde, elle produit 36kw maximum, et fonctionne en autonome. Elle a été déposée pour la première fois en 2010, après un blocage de l’hélice, soit après 28 ans de service en usage intensif. Entre temps il y a eu bien sûr des pannes plus ou moins sérieuses, car la machine fonctionne quasiment en permanence, mais sa robustesse est bien avérée. Elle vient d’être remise en service, en ce mois d’octobre 2011, après une révision complète, remplacement des pignons du multiplicateur, des roulements et de la boulonnerie.

La turbine est utilisée en autonome et fonctionne toujours à pleine charge. Le courant est consommé par le restaurant installé dans le moulin, salles, cuisines, congélateurs, ainsi que mon habitation. Elle nous rend pratiquement indépendants. En pointe la puissance est de 36 kW. Comptons 30kW x 24h = 720 kW jour x 280 jours environ soit 201 600 kWh production annuelle estimée.

 

Un exemple d’équipement de rivière par EDF qui serait à généraliser. La production d'énergie renouvelable est de plus en plus d'actualité. 24 microcentrales hydroélectriques jalonnent la rivière Mayenne (53), dont 17 gérées par EDF. Depuis début octobre 2011, d’importants travaux se déroulent à l’écluse de la Maigannerie, à Saint-Jean-sur-Mayenne. Ils consistent à installer à la centrale hydroélectrique une nouvelle turbine. D’ici 2015, les 16 barrages de la Mayenne, situées entre les communes de Saint-Baudelle et Saint-Jean-sur-Mayenne, seront équipés de ces nouvelles turbines. Le montant des travaux des aménagements à réaliser s’élève à 12 millions d’euros. Deux barrages de la rivière ont déjà été équipés, à titre expérimental, et l'essai s'est avéré concluant. L'objectif de ce programme de modernisation est accroître la production d'énergie électrique d'origine renouvelable et de protéger les poissons. Alors que les anciennes turbines étaient accusées de décimer 3% des poissons !), les nouvelles permettent d'atteindre un taux de mortalité quasi-nul.

 

La production hydroélectrique sur la Mayenne est une longue histoire. Ces aménagements hydroélectriques ont été réalisés par EDF entre 1959 et 1965 à titre d’essais pour des équipements en d’autres rivières, qui ne sont jamais venus. Mais la preuve est bien là. Elles fonctionnent au fil de l’eau. Les hauteurs de chute, comprises entre 1,50 et 2,76 m, classent ces ouvrages dans la catégorie « très faibles chutes d’eau ». L’autorisation d’exploiter ces centrales fait l’objet actuellement d’un arrêté préfectoral, pris le 5 février 1992 pour une durée de 25 ans. La production s’inscrit dans le décompte des ressources d’énergies renouvelables. Le fonctionnement des centrales n’influe que très peu sur les conditions de débit du cours d’eau. Elles fonctionnent en permanence tant que le débit est égal ou supérieur à 12 m³/s (soit du 1er novembre au 30 avril en année normale). En dessous, elles marchent par éclusées, c’est-à-dire qu’elles s’arrêtent et repartent selon le remplissage de leur bief. La turbine, totalement immergée, n'a aucun impact visuel ni sonore. La nouvelle turbine permettra de produire entre 150 et 350 kW/h, soit 500 000 kW/h à 1,2 million de kW/h par an. Selon le débit de la rivière et selon les années, l'ensemble des centrales hydroélectriques produirait entre 13 et 15 millions de kWh.

 

PS : Sur la radio France inter, le jeudi matin 10 novembre à 08h20, M. Eric Besson, ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, chargé de l'Industrie, de l'Energie et de l'Economie numérique, interviewé, déclare sans détours que « l'électricité la moins chère est l'hydraulique devant le nucléaire ». Pourtant nos élus encouragent le photovoltaïque et l'éolien qui coûtent le double du nucléaire et ne trouvent place que subventionnés, et, cerise sur le gâteau, pour compenser le futur manque de production d’électricité renouvelable, il est envisagé sans sourciller que soient construites des centrales à gaz. Alors pourquoi l'administration et le pouvoir durcissent-ils les dossiers et entravent à tour de bras le développement de l'hydraulique en basse chute ? Bonne méditation à tous et toutes. Rémy Lemoine.

 

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