Législation
– Application de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques
du 30 décembre 2006 ?
Article
de 3 pages, par Jean-François REMY Avocat
au Barreau de Nancy
Depuis
l’adoption de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques – LEMA du 30 décembre
2006, et la concentration des compétences (fonctionnelles…) de Police des
Eaux au sein des services de la DDAF, on observe une accentuation de la rigueur
des contrôles et des demandes de justifications de la part des services de l’Etat
pour toutes les activités en lien avec les cours d’eau. Les centrales
hydrauliques n’échappent pas à cette tendance, avec notamment un
renforcement des obligations en matière de curage de canaux, d’application
des débits réservés (passage général à un débit réservé au 1/10e
au premier janvier 2014 pour les installations anciennes). Certaines
administrations se plaisent même à annoncer une disparition des droits fondés
en titre d’ici à 2014, ce qui est faux.
La
nature des droits fondés en titre à l’usage de l’eau, survivance des
droits de l’Ancien Régime et du système féodal, a de longue date intrigué
les services de l’Etat, dont certains membres ont régulièrement tenté de
les méconnaître ou de les prétendre disparus. Il suffit à ce titre de se référer
au principe erroné, longtemps soutenu par certains Préfets, selon lequel un
droit fondé en titre se perdrait par le simple fait du non usage.
On
sait toutefois que depuis, le Conseil d’Etat et la Cour de Cassation ont à
plusieurs reprises réaffirmé qu’un droit fondé en titre ne se perdait pas
par le seul fait du non usage, et que sa perte ne pouvait se déduire que de
l’action volontaire du propriétaire de l’installation démontrant une
volonté d’y renoncer, et rendant les installations impropres à un usage de
production d’énergie hydraulique (transformation définitive d’un moulin en
logement, avec démontage des meules et rebouchage des entrées d’eau).
Certaines
administrations voudraient aujourd’hui à nouveau faire croire à une future
disparition de ces droits bien particuliers en 2014. Ceci est une fois encore
inexact, car tant la loi sur
l’utilisation de l’énergie hydraulique du 16 octobre 1919 que le
Code de l’Environnement à ses articles L 214-1 et suivants (ancienne loi sur
l’eau de 1992), garantissent fermement la pérennité des droits fondés en
titre sur le long terme.
Ainsi, l’article 29 de la loi de 1919 prévoit toujours que : "Les usines ayant une existence légale, ainsi que celles qui font partie intégrante d'entreprises déclarées d'utilité publique et pour lesquelles un règlement spécial sera arrêté par un décret rendu en Conseil d'Etat, ne sont pas soumises aux dispositions des titres Ier et V de la présente loi".
De même, l’article L 214-6 II du Code de l’Environnement prévoit toujours lui aussi que : "II. - Les installations, ouvrages et activités déclarés ou autorisés en application d'une législation ou réglementation relative à l'eau antérieure au 4 janvier 1992 sont réputés déclarés ou autorisés en application des dispositions de la présente section. Il en est de même des installations et ouvrages fondés en titre".
Au
vu de ces éléments, la validité des droits fondés en titre à l’usage de
l’eau est donc toujours garantie par la loi, et il n’est absolument pas prévu
d’en assurer la disparition au 1er janvier 2014.
Il
est en revanche à noter qu’à compter de cette date, les dispositions
suivantes seront applicables à toutes les installations hydrauliques, fondées
en titre, concédées ou autorisées :
-
Le débit réservé sera porté de façon générale à un minimum de 10
% du débit moyen interannuel du cours d’eau, sauf
dans
le cas de certaines installations contribuant aux équilibres énergétiques du
réseau français, ainsi que pour certaines installations à débit dit atypique
(ceci concernant essentiellement les ouvrages EDF) – Article L 214-18 du Code
de l’Environnement.
-
Les autorisations, concessions, ou conditions d’exploitation d’un
droit fondé en titre pourront également faire l’objet, à compter de cette
date, de toutes les adaptations nécessaires pour assurer une conformité aux
dispositions des SDAGE (passage des poissons, des anguilles…), et ceci en dépit
même de l’éventuel désaccord de l’exploitant - Article L 214-4 du Code de
l’Environnement).
Au
regard de ces dispositions, il apparaît bien que si l’usage des droits fondés
en titre sera de plus en plus encadré, ils n’en disparaîtront pas pour
autant, et permettront encore de ressusciter des sites endormis depuis
longtemps, et de les faire fonctionner pour plus longtemps encore !
Autres points
traités dans cet article : L’augmentation
de puissance simplifiée de 20 % et les droits fondés en titre et l’administration
est-elle juridiquement tenue au respect de prises de position ou de décisions
antérieures ?