Pratiquement au centre de l’Espagne, la région de Castilla-la-Mancha comprend les provinces de Tolédo, Guadalajar, Cuenca, Ciudad Real et Albacete. Ce vaste plateau à 650 m d'altitude,  est dédié à la culture des céréales, à la vigne et à l'élevage des moutons.

La Mancha est aussi, dans l’imaginaire de chacun, le pays de Don Quichotte et des moulins, les deux  intimement liés.

Le moulin manchego est formé d'une tour cylindrique de 5 à 6 mètres de diamètre et de 8 à 10 m de haut, surmonté d'un toit conique. Les murs des deux premiers niveaux sont épais et puissants, percés seulement d'une porte et parfois d'une petite fenêtre au premier étage. Cette épaisseur se réduit de plus de moitié, au 2^ème étage, qui abrite la chambre des meules. Le rez-de-chaussée et le 1^er étage sont occupés surtout par deux solides escaliers de pierre avec rampe pleine en maçonnerie, indispensable pour monter les sacs de grain dans ce moulin dépourvu de monte-sac. L'étage des meules est percé de petites lucarnes fermées par des volets intérieurs en bois, parfois 12, correspondant aux 12 vents de la Mancha.

Le centre du 2^ème étage est occupé par l'unique paire de meules, monolithe le plus souvent et rayonnée en arc de cercle. L'archure est en bois ou en sparterie.

L'arbre moteur repose sur deux marbres (pierres dures), un à l'avant (gros collet) l'autre à l'arrière (petit collet). Le collet arrière n'est pas coiffé d'un joug mais d'une simple bride métallique de sécurité non jointive. Il porte quatre ailes de 14 à 16 m d'envergure, à barreaux munies de barres longitudinales formant treillis ou claie.

L'arbre moteur porte un grand rouet, qui paraît immense, fiché d’une cinquantaine de gros alluchons. Il est possible que le rouet soit surdimensionné  à seule fin  d’assurer la stabilité de l'arbre. Les alluchons engrènent sur une lanterne en bois, elle se réduit parfois à une simple pièce de bois massive dans laquelle ont été creusés des évidements où viennent se loger les alluchons . Ce moulin  ne comporte pas de blutoir.

Principaux sites de moulins à vent de la Mancha.

Mota Del Cuervo "El Balcon de la Mancha".

En arrivant à Mota Del Cuervo , sur la colline qui domine la ville, 7 moulins nous attendent sous le soleil éclatant. Il sont implantés un peu au hasard mais forment, vus de loin, un alignement remarquable. Ils sont tous du même type, plus ou moins, hauts ou larges, avec leurs ailes caractéristiques "en treillis". Sur le bord extrême de la colline, l'un deux semble veiller sur la cité. Presque tous appartiennent à la ville et à l'association. El GIGENTE, le Géant, avec ses ailes garnies de toile, moud du grain, quand le vent le permet. Il répond en tous points à la description du moulin manchego.

Nous avons été chaleureusement reçu par Monsieur Enrique TIRADO, Président de l'Association "Amigos de los Molinos" et par ses meuniers.

Campo de Criptanna et ses 32 moulins

Le principal attrait de Campo de Criptana tient à ses moulins situés sur la colline de la Paz qui domine le village au nord. On comptait à l'origine 32 moulins à vent répartis de façon irrégulière sur la colline, 2 ou 3 étant carrément intégrés dans le haut du village. Dix ont été conservés et 3 d'entre eux classés monuments en raison de leur ancienneté. Le Burletta, datant de 1555, est resté intact et peut moudre du grain. L'Infante datant de 1500 est en partie détérioré ; le Sardinero est en meilleur état. Ces 3 moulins appartiennent à la  Municipalité de Campo. Curieusement, les 7 autres furent construits à partir de 1900, ce qui démontre que cette région est restée très longtemps dans un type d’économie traditionnelle.

Nous nous sommes entretenus avec le secrétaire de l'Association culturelle et technique des Meuniers d'Espagne, qui regroupe 170 "meuniers" et est un peu l'équivalent de notre ANMF. L'association édite une revue "Molineria Tecnica". Notre hôte nous a donné quelques informations sur l'évolution et les difficultés de la Meunerie espagnole, marquée par des surcapacités de mouture et l'érosion des prix. Le système du « contingentement » est inconnu en Espagne mais les meuniers le revendiquent ?

Les moulins de Consuégra

Consuegra est une ville importante de la Mancha de Tolède établie sur un ancien castrum romain. Elle est dominée par le Mont Calderico, dernier contrefort des Monts de Tolède. Cette crête qui cascade vers la ville et vers la plaine porte deux groupes de moulins à vent de part et d'autre d'un château fort. Ce dernier date de la première période de la reconquête. Il fut construit probablement par les chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem fin XII^e début XIII^è siècle et est d'aspect austère.

Au-dessus du château, à l'opposé de la ville s’élèvent 6 moulins. Entre la ville et le château s’élèvent 5 autres moulins dont le célèbre Sancho Panza où se déroule chaque année la Mouture de la Paix. Tous ces moulins portent un nom. Ils sont en parfait état et possèdent leur mécanisme de mouture. Consuegra a compté aussi deux moulins à eau sur la rivière qui traverse la ville.

Le dernier Week-end d’octobre, CONSUEGRA est en fête. Pendant deux jours vont se dérouler en présence de plusieurs milliers de personnes de nombreuses festivités. Les deux principales sont la MOLIENDA DE LA PAZ (Mouture de la Paix) le samedi et la fête du Safran le dimanche. Dès le milieu de l'après-midi, la foule monte aux moulins et s'installe sur les flancs de la colline. On rassemble des sacs de blé venant de toutes les régions de l'Espagne et des Pays étrangers. Après les discours d'usage, les petits sacs de grain sont montés à la meule et symboliquement déversés dans la trémie par la Dulcinée de l'Année, ses demoiselles d'honneur et les personnalités. Ce geste accompli, tout le monde redescend avec son petit sac de farine « préparé à l'avance ».

Le 26 octobre, notre groupe a participé à la Molienda de la Paz et  le Secrétaire Général de la FFAM a eu l'honneur d'être invité à participer, en haut du moulin, à la très symbolique Mouture de la Paix.

J.Y. TARDIVEAU a prononcé une allocution remarquée et pleine d'humour, et a remis, en notre nom, au  Maire de Consuegra une médaille.

Sur les routes de la Mancha, de nombreux autres moulins à vent  et  sites  sont liés à Don Quichotte

Partis de Tolède, nous avons fait une première halte-déjeuner à Tembleque, dont nous avons admiré la magnifique Plazza Major. Un peu plus loin, une colline était couronnée de 31 éoliennes modernes, preuve que l'utilisation du vent a trouvé "son second souffle", dans la Mancha.

Au cours de nos déplacements, nous avons  rencontré très souvent des moulins à vent, bien entretenus et munis de leur ailes. De la colline de Mota Del Cuervo, nous apercevions au loin 4 moulins ; Sur la route de Don Quichotte, nous en avons vu 2 avant El Toboso qui en compte 9 plus un moulin à huile à traction animale, 5 à Alcazar de San Juan, 4 à Herencia. Selon J. GUILBAUT, on en trouve aussi 4 à Pedro Munoz, 3 à El Pedonoso et 2 à Belmonte.

Toujours dans le sillage de notre "Chevalier à la triste figure", nous avons fait une longue halte à EL Toboso pour visiter la Maison de Dulcinée et le Musée Cervantin. La Maison de Dulcinée incarne pour les gens de la ville et de la Mancha, dona Ana Martinez Zarco Morales, son ancienne locataire qu'on identifie avec la Dulcinée de don Quichotte. La maison est une métairie typique du XVIème siècle. Elle possède une façade seigneuriale ornée de deux blasons. Dans le patio, un immense pressoir "casse-cou" dont l'axe, d'une section de 60 x 60 cm, mesure 15 mètres de long.

Sur la place, ornée des statues modernes de Don Quichotte et Dulcinée, on peut admirer l'église de San Antonio Aba du XIIè s. et visiter le Musée Cervantès.

Enfin, nous nous sommes désaltérés à Puerto Lapice, à la Venta (auberge) de Don Quichotte, où selon la légende le célèbre Hidalgo fut fait chevalier...par l'aubergiste..